Soyons d’accord : personne ne détient la recette du livre parfait. Il existe toutefois quelques petites astuces qui peuvent aider l’auteur dans la rédaction de son manuscrit. Les articles suivants ne sont donc pas des règles strictes à mettre en application comme un mode d’emploi. Toutes les règles peuvent être enfreintes. Il s’agit plutôt de points d’attention sur lesquels l’auteur est invité à réfléchir pour mieux connaître son écriture et peut-être remarquer certaines lourdeurs qui sont parfois inconscientes.
Les dialogues sont une composante essentielle de l’écriture. Ils permettent de dynamiser le texte, d’approfondir la psychologie des personnages et de ménager des temps de pause dans l’action. Il faut donc y accorder un soin particulier.
Un style trop formel risque de rendre le texte peu crédible. Un style familier, quant à lui, peut être occasionnel, mais entraîne vite des lourdeurs. Il est conseillé de ne pas abuser des élisions. Même si certaines lettres ne seront pas prononcées, mieux vaut les transcrire et qualifier plutôt le ton au travers des descriptions qui entoureront le dialogue (mieux vaut dire qu’il mâchait ses mots que de marquer des élisions un mot sur deux). Il est bon de se souvenir que le dialogue n’a pas pour but de retranscrire le réel lui-même (les phrases telles qu’elles seraient prononcées), mais plutôt un effet de réel (permettre au lecteur d’imaginer la scène). C’est une distinction vraiment essentielle. Même au théâtre ou au cinéma, on ne reproduira pas forcément des phrases telles qu’on les dirait au quotidien, mais ça n’empêchera pas l’auditeur d’adhérer au récit. C’est encore plus vrai pour les romans.
Il ne faut pas non plus oublier que les dialogues ne doivent jamais devenir du remplissage, sous peine d’alourdir considérablement le texte. Ils se doivent d’être pertinents et de se substituent à la narration pour apporter une plus-value. Il est donc important d’éviter les dialogues qui répètent la narration, où aucune information n’est apportée durant les trois phrases de dialogues. Attention aussi aux dialogues trop systématiques, que l’on est parfois tenté d’écrire par imitation du cinéma. La littérature a de nombreux autres moyens de faire passer des informations que le seul dialogue.
Les incises sont extrêmement pratiques, mais attention à ne pas en abuser. De même que le dialogue ne doit pas répéter l’action, l’incise ne doit pas répéter le dialogue. Inutile de préciser le locuteur si cela va de soi avec un « dit-il » bien superflu. Inutile aussi de qualifier le ton si les mots sont assez clairs par eux-mêmes. Les incises fonctionnent comme les smileys : si les mots sont bien choisis, ils font passer par eux-mêmes l’expression qui les accompagne. Il n’est pas nécessaire d’ajouter un smiley qui rigole après un « haha ». Il n’est pas non plus important de préciser « dit-il avec un regard amoureux » après un « Je t’aime ».
Un passage paraît ennuyeux et semble tomber à plat ? Peut-être est-ce l’occasion de réfléchir un peu au rythme des phrases. Voici quelques points d’attention qui peuvent aider.
Tous les groupes d’écriture ont vu passer l’éternel débat de la longueur des phrases. Les arguments sont classiques et dichotomiques : certains soutiennent qu’il est nécessaire d’enchaîner les phrases courtes pour garder l’attention du lecteur et l’immerger plus facilement dans le récit, tandis que d’autres gardent la conviction que seules les phrases plus longues permettent la richesse stylistique. Beaucoup d’écrivains ne sont d’accord avec aucune de ces positions. Ce qui compte n’est finalement pas tant la question de la longueur que celle de la variation. Peu importe que les phrases soient brèves ou kilométriques, la répétition de longueurs similaires va produire le même effet, à savoir une redondance qui sera peu stimulante pour le lecteur. L’esprit de l’homme est fainéant : lorsqu’on écrit, il est fréquent d’enchaîner des structures comparables, plus faciles à produire que des phrases sans cesse différentes. Or, lors d’une lecture, la répétition de ces structures va tendre à émousser l’attention et ennuyer le lecteur plus rapidement, tandis que la variété va le stimuler. Il ne faut jamais hésiter à surprendre le lecteur en introduisant un élément stylistique différent. Cette variation va donner du rythme au texte et permettre certaines mises en valeur. Si on s’intéresse quelque peu au discours, on remarque qu’une phrase simple après une longue tirade produit souvent un effet impressionnant, qu’une suite de phrases longues ou brèves n’aurait pas obtenu.
Dans cette même logique d’introduire la variation et de lutter contre la monotonie, il est important de prêter attention à l’ordre des mots. Une page complète de phrases du type « sujet-verbe-complément », peut très vite devenir lassant. Ça l’est encore plus avec des structures plus remarquables (questions, procédés d’énonciation, complément en tête de phrases, phrases averbales, exclamations…). Glisser de temps en temps une phrase différente apportera beaucoup de dynamisme.
Plus subtile encore, il faut se méfier des phrases dont le sujet est constamment un pronom
personnel. Attention à déplacer la caméra du seul personnage, la fixer sur un objet, un regard
ou créer un plan plus large en alternant action et description. Cela permet notamment d’éviter
les répétitions des prénoms des personnages et des formules souvent maladroites du type « le
quarantenaire », « l’écolière », etc.
Toutes ces considérations donnent matière à penser, mais pas de panique ! L’auteur reste seul
maître de son clavier. Cette théorie du rythme permet surtout de trouver des astuces pour
remédier à un passage qui est peut-être moins dynamique.
Un autre débat incontournable dans les groupes d’écriture est la double question du choix du temps du récit et du narrateur. En réalité, tous les choix peuvent se justifier, mais les effets ne seront pas les mêmes et il est donc intéressant de réfléchir à ce que l’on recherche par notre texte pour trouver la formule dans laquelle on sera le plus à l’aise. Par exemple, dans leurs romans, certains auteurs utilisent à la fois la première personne et la troisième, et alternent le passé et le présent, parce que ces différentes dimensions répondent au mieux à leurs besoins. Cette possibilité est une parmi d’autres. Une réflexion est parfois nécessaire afin de faire les bons choix. Voici quelques pistes.
Eternel débat ! Pourtant, les arguments manquent parfois de fond. Alors comment se
positionner ?
- Le présent est souvent décrit comme un temps plus facile à utiliser et à saisir. Il est vrai qu’il
peut aider le lecteur à entrer plus facilement dans l’histoire. Par ailleurs, il convient très bien
aux passages réflexifs, qui sont en dehors du récit. Néanmoins, le présent recèle une fausse
facilité. La première difficulté concerne les descriptions. L’écriture au passé permet d’opposer
l’imparfait et le passé simple, et de mettre ainsi en relief les différences de rythmes du texte.
Cette dualité temporelle n’existe pas avec le présent et il faut en prendre bien conscience pour
ménager d’autres astuces. Les longues descriptions peuvent paraître un peu plates lorsqu’elles
sont écrites au présent. Un second point qui nécessite une attention est la concordance des
temps. En effet, le temps qui marque l’antériorité dans un contexte présent devrait être le
passé composé. Il est toutefois possible de trouver de l’imparfait ou du passé simple, mais le
risque est grand de tout mélanger et de perdre la cohérence temporelle. Cela nécessite donc de
bien y réfléchir. Enfin, lorsqu’on combine le présent avec une narration à la première
personne du singulier, il faut savoir que plusieurs verbes n’acceptent normalement pas
l’inversion. La grammaire Grevisse indique que les verbes en –e concerné par une inversion
avec la première personne du singulier prennent un accent et ont ainsi leur final en « -é » dans
l’ancienne orthographe et en « -è » dans la nouvelle (pensé-je, pensè-je), des formes peu
esthétiques et mélodieuses. En dehors de ces verbes-là, l’inversion n’est autorisée qu’avec
quelques verbes très fréquents : ai, dis, dois, fais, puis, sais, suis, vais, veux, vois.
Les incises et questions rhétoriques sont donc à manier avec le plus grand soin lorsqu’on choisit d’écrire
au présent et à la première personne.
- Le passé reste assez traditionnel dans le récit. Certains considèrent toutefois le passé simple
comme trop hermétique et même artificiel ou trop difficile à employer. Il est vrai qu’un récit
au passé va demander un peu plus de temps pour que le lecteur y adhère. Le principal point
fort des récits au passé est la complémentarité du passé simple et de l’imparfait, qui permet
une alternance et certains effets de rythme ou de stylistique très intéressants. Le passé
s’adapte également très bien au découpage scénique, alors que le présent permet justement de
s’en affranchir plus facilement. Au niveau de la concordance des temps, une difficulté se
présente par rapport aux subjonctifs imparfait et plus-que-parfait, qui sont parfois requis en
contexte passé, mais très peu utilisés (et connus) de nos jours. On remarque toutefois une
certaine souplesse permettant de les remplacer par des subjonctifs présent et parfait. Enfin,
dans les récits à la première personne, la première personne du pluriel du passé simple donne
lieu à des formes peu élégantes, une difficulté qu’il faut garder à l’esprit.
Toutes les solutions sont possibles et chacun doit réfléchir à son projet en fonction de ses buts
et de ses besoins. Il est également possible de combiner dans un même roman des passages au
présent et au passé, voire même au futur, tant que le texte reste cohérent. Il s’agit vraiment
d’un choix à poser pour servir au mieux son projet littéraire.
Avant d’écrire un roman, le récit nous apparaît souvent dans sa linéarité et de manière omnisciente. On ne se pose pas toujours la question du prisme à utiliser pour faire passer le texte, alors qu’il existe de nombreuses possibilités et que ce choix sera déterminant pour la forme du roman.
La première question à se poser est généralement de savoir si on va relater le récit à la
première personne ou à la troisième. Il existe à nouveau des avantages et inconvénients qui
valent la peine d’être médités.
- Le récit à la première personne est souvent décrit comme le moyen le plus efficace pour
immerger le lecteur, qui se sentira directement impliqué par le récit et pourra s’identifier plus
facilement au héros. Toutefois, il s’agit parfois d’une fausse facilité. En effet, tout le récit va
passer par le prisme du regard du narrateur et sera donc toujours déformé. Cela génère deux
écueils essentiels. Si on veut garder une narration assez neutre et globale, le caractère du héros
risque d’être finalement peu perçu et effacé. À l’inverse, si on marque fortement le caractère
du héros, la narration risque d’être bouleversée, discontinue et parfois plus difficile à suivre.
En effet, si le héros connaît une émotion importante, on s’attend à ce que la narration s’en
ressente et qu’il ne relate plus le récit avec autant de rigueur et d’objectivité. L’idéal est
probablement un entre-deux et il revient à chaque auteur de prendre position sur ce terrain. Il
faut également prendre conscience que le fait qu’un personnage relate l’action rend plus
difficile de dissimuler des informations au lecteur, puisqu’il semblerait logique que les
informations connues par le personnage influencent sa perception des éléments. C’est
toutefois faisable de garder des effets de surprise et même des effets importants, mais
demande un certain doigté. Par ailleurs, la narration à la première personne se démarque
moins des dialogues et l’auteur risque de voir son texte tomber dans une certaine monotonie,
car les dialogues introduiront moins de variation rythmique que dans un texte à la troisième
personne. Enfin, dans les textes où le narrateur vient à changer dans une partie du roman, la
question est de trouver un équilibre pour individualiser la narration de chaque personnage et
respecter le fait que le récit est perçu à travers un regard personnel, tout en gardant une
certaine cohérence dans l’œuvre pour que le lecteur puisse y adhérer. Idéalement, il faudrait
pouvoir ouvrir le roman à n’importe quelle page et reconnaître le narrateur du passage rien
qu’avec des traits linguistiques et la mise en forme de sa narration.
- Le récit à la troisième personne peut également se voir confronter à la plupart des problèmes
énumérés ci-dessus. Si la narration se concentre fortement sur l’un des personnages, les points
d’attention seront à peu près les mêmes que ceux cités précédemment. Il sera peut-être plus
facile de les résoudre, puisqu’un des avantages de la narration à la troisième personne est de
permettre beaucoup d’aisance dans la focalisation. Il est plus facile de glisser d’un personnage
à l’autre, d’un point de vue omniscient à un focus sur un personnage, et il est possible
combiner plusieurs approches au sein d’une même scène (même si cela demande un certain
doigté, cela est beaucoup plus simple que le changement de focalisation dans un texte à la
première personne). Il y a en revanche un risque de lourdeur peut-être plus important que dans
un texte à la première personne. Les répétitions des pronoms personnels sujets, des prénoms
et autres périphrases pour désigner le héros risquent de devenir plus facilement dérangeante
qu’une répétition de « je ». De plus, certains prénoms créent des répétitions sonores qui
alourdissent encore cette répétition. Par exemple, le prénom Estelle est assez difficile à utiliser
dans un roman car il crée une impression de répétition avec le pronom « elle ». Il faudra donc
user d’une certaine créativité dans le vocabulaire, mais surtout dans les structures, pour
alléger le texte.
Il est aussi bon de rappeler que le choix du narrateur ne doit pas obligatoirement se porter sur
le héros. Il est assez naturel de suivre le personnage principal de l’action, mais d’autres
options existent. On peut par exemple utiliser une mise en abyme ou un personnage
secondaire. Certains personnages, comme les enfants, les personnages atteints d’une forme de
folie ou des personnages étrangers à l’histoire peuvent apporter un regard réellement innovant
à la narration. Il est aussi possible d’utiliser plusieurs personnages comme narrateurs. Ce
procédé est assez courant et peut apporter une grande richesse au récit. Il faut cependant faire
attention à ce qu’il ne présente pas un frein trop important à la progression de l’action. Il peut
être ennuyeux pour le lecteur de passer par de nombreux personnages différents et devoir
attendre une dizaine de chapitres pour retrouver le personnage qui l’intéresse le plus.
On ne prend pas toujours le temps de réfléchir à la structure que l’on va donner à son texte. Pourtant, il y a différents points d’attention qui méritent d’être interrogés.
La méthode flocon propose d’envisager le récit en quatre points forts. Chaque quart du roman devrait aboutir à un nœud narratif qui constitue un tournant du texte. Ce rythme est assez intéressant et s’adapte à de nombreux projets littéraires. L’écriture de scénario propose également d’autres structures. La théorie des trois actes, venue du théâtre, propose de diviser un récit en exposition-développement-résolution. La théorie de John Truby propose 22 étapes et stipule que le héros devrait passer par au moins sept d’entre elles. Celles en majuscules sont présentées comme plus importantes :
Lorsqu’on réfléchit à la structure du roman, il est assez naturel de suivre un fil rouge de manière chronologique. Aussi, au moment de l’écriture, beaucoup de jeunes auteurs utilisent une narration assez linéaire. Il est pourtant tout à fait possible d’introduire de la variation. C’est toujours intéressant d’introduire du dynamisme. Il est possible de briser cette linéarité. Il existe de nombreux procédés et la seule limite est l’imagination de l’auteur. Les rétrospections – ou flash-backs – utilisent différentes temporalités et permettent de creuser le récit, d’ajouter de la profondeur à certains éléments. Le procédé inverse, consistant à briser la chronologie en insérant une scène postérieure au temps du récit, est nettement moins utilisé. Pourtant, les anticipations peuvent être assez intéressantes pour éveiller la curiosité du lecteur et raviver son intérêt. Il est par exemple possible de plonger le lecteur dans une scène qui semble manquer de contexte (récit in medias res) et qui le surprend, avant de remonter dans le récit pour développer les différents événements qui amènent à cette scène déjà dévoilée. Les séries télévisées utilisent souvent ce procédé, à l’aide du fameux « 24 heures plus tôt ». Ainsi, l’imagination ne doit pas être bridée par un carcan chronologique trop contraignant. Il est aussi très fréquent d’envisager chaque chapitre comme porteur d’une scène. Pourtant, il ne faut pas hésiter à en sortir, prendre de la hauteur, utiliser des sommaires, revenir à l’action de manière plus ou moins préparée. Tout est possible et il serait dommage de se limiter à tout relater comme une succession scénique.
Puisqu’on casse la linéarité du récit, on a tendance à vouloir marquer la rupture dans la typographie. Beaucoup recourent ainsi à l’italique, un changement de police ou utilisent une numérotation différente (par exemple des chiffres romains pour les chapitres dans la simultanéité et des chiffres arabes pour les chapitres dans l’antériorité). Il est aussi possible de changer le narrateur ou le temps de la narration. Au-delà de ces procédés, il est intéressant de marquer également ce décalage dans l’approche que l’on fera de l’action, surtout si la scène prend place plusieurs années auparavant ou après, ou encore si elle se situe par rapport à un épisode de crise pour le personnage. En effet, on pourrait s’attendre à voir les personnages adopter un comportement plus ou moins différent d’une époque à autre. Certains auteurs prennent le parti de ne pas marquer par la forme le changement de temporalité, puisque le fond devrait suffire à faire comprendre au lecteur qu’il s’agit d’un autre moment. Cela peut réclamer un peu plus de temps d’adaptation au lecteur pour comprendre la rupture, mais cet inconfort n’est pas forcément négatif et peut même être stimulant. Tout dépend donc du projet d’écriture et des goûts de chacun.
Tout auteur connaît cette frustration terrible nommée « syndrome de la page blanche ». Rappelons tout d’abord que le cerveau a besoin d’environ 15 minutes pour parvenir à une concentration optimale. Alors si les idées ne viennent pas aussitôt qu’on se met devant le clavier, pas de panique et un peu de patience !
Certains soutiendront qu’il est essentiel d’écrire tous les jours, pour garder l’habitude et pouvoir s’améliorer. D’autres alternent des phases créatives et des phases de latences. Tout cela reste très personnel. L’exercice peut stimuler certains, alors que d’autres vont produire des phrases mécaniques sans s’offrir le recul qui peut être nécessaire pour s’améliorer. En revanche, il est certain qu’il peut aider d’instaurer une routine. Celle-ci permettra au cerveau de se conditionner et d’associer le rituel à un moment de concentration et de créativité. Ce rituel peut être assez court et simple. Une tasse de thé, une musique, un lieu précis, un moment de la journée… De la même manière que nos rituels du soir nous aident à nous endormir, ces petits gestes aident à se mettre dans sa bulle.
« La nuit porterait conseil », selon l’adage. Il n’est en effet pas rare de ne pas trouver de solutions à une problématique, et voir soudain surgir comme une évidence une nouvelle idée. Une partie de notre cerveau continue en fait à travailler sur la question et y réfléchir sans que l’on y pense. Ainsi, si on se sent bloqué, il ne faut pas hésiter à écrire la question quelque part, laisser son esprit se reposer et y revenir plus tard. Ce sera souvent plus productif que de s’acharner et ne trouver finalement qu’une idée bancale qui ne fonctionne pas vraiment. Il faut laisser les idées germer, sans les bousculer. Qu’il s’agisse d’inventer un personnage, de trouver un dénouement ou une scène originale, il est important d’y penser !
Les premières idées qui nous viennent manquent souvent d’originalité. Aussi, il peut être bon de chercher systématiquement non pas une idée, mais trois, six, sept, voire plus encore. Il est possible d’appliquer cette gymnastique d’esprit à n’importe quel élément du roman, du plus large au plus ponctuel : le prénom d’un personnage, une métaphore, une réplique d’un dialogue, un retournement de situation, la profession du héros… Il faut multiplier les pistes, varier les points de vue, rien n’est jamais figé ou déterminé à l’avance.
Lorsqu’on cale sur un passage précis, c’est souvent parce qu’on s’obstine à l’aborder toujours selon le même angle. Il suffit parfois de changer un élément pour se débloquer. Cela peut être l’attitude d’un personnage, le cadrage scénique, le lieu… Tout peut être changé et s’entraîner à réécrire la scène selon d’autres angles peut débloquer la créativité et peut rappeler que l’écriture est avant tout une invention où la liberté est immense. Cela étant, la liberté peut parfois être très intimidante. Une autre démarche consiste alors à se fixer quelques contraintes pour poser un cadre dans lequel il n’y a plus qu’à chercher comment relier les différents éléments.
Lorsqu’on réalise combien d’histoires ont déjà été écrites, on se dit qu’il est difficile, voire impossible d’inventer de nouvelles choses. Tout aurait déjà été fait ! Pourtant, de la même manière que les 7 milliards d’humains sur Terre sont tous différents, chaque récit est personnel. Il ne faut pas craindre ce qui a déjà été écrit, car il y a toujours de nouveaux points de vue à adopter, de nouvelles époques, des caractères différents et on créera donc une multitude d’histoires différentes avec des ingrédients assez proches. Cela dit, les premiers textes que l’on écrit sont souvent empreints de stéréotypes. Il est assez normal de commencer par une démarche d’imitation, il faut toutefois arriver à s’en affranchir et à affirmer un style plus personnel. Le but est ici d’attirer l’attention sur les stéréotypes les plus fréquents, non pas pour les bannir à tout prix, mais pour apprendre à les repérer dans la rédaction du récit et réfléchir à une manière plus innovante de les utiliser, si on persiste à les employer.
- Le gentil trop gentil, qui ne commet pas d’erreurs, montre une rigueur morale à toute
épreuve. Si en plus ce personnage est le héros, le stéréotype risque de devenir gênant.
- À l’opposé, le méchant trop méchant, qui ne se remet pas en question et agit par cupidité ou
jalousie. Le manichéisme (opposition des bons et des méchants) est vraiment le pire des
clichés
- La personne âgée pleine de sagesse
- L’enfant innocent et très intuitif
- Le personnage atteint de folie qui manifeste en fait une grande perspicacité
- La pompom-girl superficielle, l’intello rejetée par les autres mais très gentille, le capitaine de
l’équipe de basket populaire et séduisant…
- L’orphelin qui est en fait issu d’une grande lignée
- L’enquêteur taciturne, la mine sombre, qui se fie toujours à son instinct
- Le personnage doté de dons extraordinaires qui garde le secret auprès de tous
- Le colosse au cœur sensible
- Le meilleur ami légèrement bouffon
- Les parents dévoués et tendres
- Le brun ténébreux très séduisant, qui cache des blessures derrière son assurance
- La jeune fille maladroite, mais tout de même adorable, présentée comme un mauvais
caractère et un grand sens de la répartie
- Le tyran qui monopolise le pouvoir
- Les elfes raffinés, les nains bourrus, les trolls méchants…
- Les jumeaux qui ont des caractères opposés
- Le chef borné qui refuse de suivre les conseils plein de bon sens du héros, juste pour rappeler
qu’il est le chef
- Les amoureux qui n’ont rien en commun et n’auraient pas dû se rencontrer
- La brute sadique qui sert d’acolyte au méchant
- L’ex-petit ami est un idiot
- La réunion matinale au poste de police qui présente l’affaire à résoudre et distribue les tâches
- Le roman qui s’ouvre sur le réveil du personnage (surtout quand c’est le premier jour d’écolede l’année scolaire)
- La bombe désamorcée quelques secondes avant son explosion
- L’infiltration qui tourne mal où les héros sont systématiquement repérés
- Le rayon de soleil après une nuit d’amour
- La dispute des futurs amants lors de leur première rencontre
- Le souvenir d’enfance qui dégouline de pathos
- Les dernières paroles spirituelles du mourant
- Les prophéties, quel que soit le contenu
- Les conversations tendres et intimes autour du feu ou pendant l’orage
- Les héros qui se cachent, mais laissent échapper un éternuement, un caillou qui glisse…
- La main qui glisse quand un personnage est suspendu dans le vide
- La cascade inévitable quand les personnages s’échappent dans une rivière
- Les mots de passe trop facile à deviner
- Le monologue du méchant qui raconte pourquoi il est méchant et son plan génial
- Les personnages qui sortent du coma, mais sont amnésiques (pas d’autres troubles apparents)
- Les rêves bourrés de sens
- Les balades à cheval alors qu’aucun personnage n’est un cavalier aguerri
- Les pouvoirs magiques sans limite
- Le poison qui est contré juste avant de tuer le personnage (ou la maladie incurable guérie)
- Les comparaisons entre les sentiments et la météo ou les saisons
- Noir de jais
- Les larmes perlaient sur ses joues
- Des étoiles dans les yeux
- Des cheveux noirs comme l’ébène
- Les descriptions couleurs des cheveux + couleurs des yeux
- Les couleurs des yeux presque surnaturelles
- La comparaison de la femme et la fleur
- Un parfum fleuri
- Un regard ténébreux
- Les déclarations d’amour dithyrambique (tu as changé ma vie, tu es la seule personne qui
compte, etc.)
- Les discours plein d’emphase
- Les yeux s’embuèrent
- La chaleur étouffante
- Le sang qui se glace dans les veines, le souffle qui se coupe
- La barbe hirsute
- Une lune blafarde
- Ses cheveux cascadaient dans son dos